La ligne Saint-Trojan - Maumusson ...
Station
intermédiaire « Le Prévent »
La station intermédiaire
du Prévent qui se situe au PK 3,2, regroupe les bureaux-ateliers de la
S.T.T.S.T depuis son origine. Cette station tient son nom de l’ancien
préventorium (aujourd’hui Foyer Départemental Lannelongue), installé
juste en face, côté Sud. Nous allons vous conter l’histoire de ce site
pour le moins original :
La brève existence
de l’ United States Naval Air Station de Saint-Trojan-les-Bains
Le 6 avril 1917, les
Etats-Unis ont officiellement déclaré la guerre à l’Allemagne. La
première des priorités chez les Alliés est de sécuriser le couloir
Atlantique. C’est pourquoi, le gouvernement français sollicite en mai
1917 la Marine des Etats-Unis afin d’augmenter en France les forces
aériennes navales. Une base aéronavale est prévue pour protéger
l’estuaire de La Gironde, car le ravitaillement en troupes et en
matériel s’effectue par le port de Bordeaux et les attaques de sous
marins ennemis sont de plus en plus fréquentes. La Préfecture Maritime
de Rochefort missionnée pour trouver un lieu d’implantation possible
confie la mission, le 14 juillet 1917, au capitaine de frégate Stolz.
Deux lieux adaptés sont retenus : La Fosse de Bri à
Saint-Trojan-les-Bains et la plage de Bonne Anse à Royan.
Le 23 août 1917, un arrêté
ministériel retient le terrain situé à proximité de la station de
sauvetage de Saint-Trojan. Le projet prévoit la construction d’une
route reliant le bourg aux Bris et l’implantation d’une base
constituée d’une cale de mise à l’eau, de quatre hangars Bessonneau
pouvant abriter de 16 à 24 hydravions, dont 12 armés, de divers
baraquements et d’une voie ferrée étroite qui relie la zone technique
aux cales.
A partir d’octobre 1917,
un officier français, à la tête d’un corps de travailleurs coloniaux
est chargé des premiers travaux.
Le premier détachement
américain arrive le 9 novembre 1917. Le 21 novembre de la même année,
une vedette d’aviation Despujols de 12 m, devant servir aux
remorquages, y est affectée. Le 29 janvier 1918, un détachement de
pilotes et de mécaniciens, tous engagés volontaires, commandés par le
lieutenant Griffin, chef de la base, arrive à Saint-Trojan. D’avril à
juin 1918, deux hangars, débarqués à Pauillac deux mois auparavant,
sont montés par les 345 hommes que compte l’unité, ainsi que la
première cale.
Le 22 juin 1918, les deux
premiers hydravions Le Pen rallient Saint-Trojan depuis Le
Croisic. Ces appareils de construction française, équipés d’un moteur
Renault de 280 chevaux, emportent chacun deux bombes de 150 livres. Le
14 juillet 1918, la base de Saint-Trojan devient officiellement
Naval Air Station de Saint-Trojan. Le 19 juillet 1918, jour du
premier service opérationnel, 10 appareils sont affectés à la base.
Avec la seconde cale est achevée en août, 8 appareils supplémentaires
sont affectés, bientôt rejoints par de puissants Curtiss HS 1L
équipés d’un moteur Liberty de 400 chevaux. Trois autres types de
Curtiss seront utilisés à Saint-Trojan : le HS 2L, de plus
grande envergure, le H 16 doté de deux moteurs Liberty, et le
PS utilisé comme appareil de liaison. Tous ces appareils sont
codés dans la série ST pour Saint-Trojan, suivi d’un numéro d’ordre.
Une voie ferrée, en écartement 0,40 m est installée à travers tout le
camp et dessert le ponton sur la Baie de Gatseau (des traces
subsistent côté plage).
Dès août 1918, ces
appareils patrouillent jusqu’à 20 milles au large dans un secteur
délimité au nord par le phare des Baleines (Ile de Ré), et au sud par
le phare de Cordouan dans l’estuaire de la Gironde. Dans le même
temps, la base est frappée comme le reste du monde par la pandémie de
grippe espagnole, 215 cas ont été recensés, et on compte entre août et
septembre 5 décès*.
Les patrouilles aériennes
se succèdent, mais aucune attaque n’est déclenchée faute de
submersibles dans les parages. Pourtant, la base va connaître le 20
août 1918, un drame. Ce jour là, lors de la mise à l’eau du Curtiss
ST 8, dont l’équipage est composé de l’enseigne de réserve Edmund
Borton Barry et du matelot observateur Vath, les vibrations engendrées
par le moteur, décrochent la bombe droite dont le détonateur avait été
imprudemment assujetti. L’explosion détruit l’hydravion, l’extrémité
de la cale et le Curtiss ST 6. Huit marins sont tués**, dont
les deux aviateurs et l’on compte 16 blessés graves, parmi lesquels
l’officier français de liaison, l’enseigne de vaisseau Larchès de
Lantier. Les obsèques ont lieu à Saint-Trojan, le 22 août 1918, en
présence du préfet maritime de Rochefort, du commandant des
patrouilles aériennes, de l’amiral américain et d’une foule
d’insulaires.
En octobre 1918, la zone
de patrouille est étendue à 40 milles des côtes, du phare des Baleines
à Hourtin (Gironde). Douze hydravions Curtiss sont en service,
dont sept en état de vol. Les quatre derniers Le Pen, frappés
par leurs capacités moindres et la pénurie de pièces de rechanges
demeurent malgré tout sur place jusqu’à l’Armistice.
Le 19 janvier 1919, la
base toujours commandée par le lieutenant Griffin, comprenant 26
officiers et 343 hommes, sera désaffectée. Au bilan : 248 sorties
(soit 328 heures de vol), 19 533 milles marins parcourus, pour aucune
victoire…
* Matelot Randolph Thomas Lee
(28/08/18) ; Intendant de 3ème classe Henry Joseph Kassing
(09/09/18) ; Quartier maître Intendant de 2ème classe James
Sylvester Kearney (14/09/18) ; Mécanicien de 2ème classe
Charles Thomas Rudy (18/09/18) ; Charpentier de 3ème classe
Hershel Owen (20/09/18).
** Enseigne de réserve pilote Edmund
Boston Barry ; Electricien de 3ème classe de réserve
(observateur) Earl Joseph Väth ; Quartier maître Intendant de 2ème
classe d’active Leonard Leander Kneeland ; Quartier maître Intendant
de 2ème classe d’active John James Mc Veigh ; matelot de 1ère
classe de réserve Matthew E. 0’Gorman ; Machiniste de 1ère
classe d’active Jessee Carter Richardson ; Quartier maître Intendant
de 2ème classe d’active Miles Henry Holley ; Intendant
d’active Lewis Franklin Tucker.
La transformation en
préventorium.
En juillet 1919, l´Office
Public d´Hygiène Sociale du Département de la Seine, qui manque
d´établissements pour promouvoir « l’hygiénisme triomphant » en vogue
depuis les années 1880, s´efforce d´obtenir le concours d´oeuvres
privées et, notamment, des oeuvres américaines. C´est ainsi que " l´Oeuvre
des maisons américaines de convalescence, qui dispose d´environ 200
lits, propose de les mettre à disposition du département de la Seine
moyennant le paiement d´un prix de journée. Elle offre en outre
d´équiper 400 lits nouveaux dans des propriétés qui devraient être
acquises par le département et mises à la disposition de l´oeuvre.
Celle-ci assurerait la gestion des établissements ainsi créés pendant
deux ans. A l´expiration de ces deux années le matériel et le mobilier
demeureraient la propriété du Département ou de l´Office Public
d´Hygiène Sociale ". C´est ainsi que, le 30 septembre 1919, le préfet
de la Seine acquiert les installations des Forces Navales américaines
à Saint-Trojan (sur 6ha50), ainsi que la vedette automobile Despujols
(de 12 mètres) nécessaire pour accéder au centre et les autres
terrains à leurs propriétaires.
L´Office Public d´Hygiène
Sociale de la Seine transforme cette base, avec le concours de
l´architecte Payret-Dortail. Les travaux sont répartis en quatre lots
: terrassements, maçonnerie, carrelage et canalisations ; charpente et
menuiserie ; couverture et plomberie ; peinture et vitrerie. En 1922,
des travaux complémentaires prévoient : l´installation du chauffage ;
une école de quatre classes pouvant contenir 50 enfants chacune ;
l´aménagement d´un bâtiment supplémentaire en dortoir de 51 lits et
celui d´un autre en salle de jeux et de cinéma. En décembre 1922, afin
d´éviter les confusions fréquentes avec le sanatorium proche, le
centre est baptisé préventorium Lannelongue (en hommage à Odilon et
Marie Lannelongue ; Odilon a été chirurgien, chercheur, sénateur,
membre de l´Académie des Sciences, fondateur du congrès annuel
français de chirurgie et infirmière, proche de Félix Faure, il était
décédé en 1911). A la veille de la guerre, l´établissement comprenait
300 lits pour garçons de 6 à 16 ans, originaires de la région
parisienne et atteints de primo-infection tuberculeuse. L´un des
hangars à hydravions était conservé alors pour abriter les jeux des
enfants par mauvais temps.
En 1937, la municipalité
de Saint-Trojan apporte son soutien à un projet d’aérodrome mixte,
civil et militaire implanté aux Bris, à proximité de l’ancienne base
américaine. Cependant, faute de crédits des pouvoirs publics, ce
projet sera abandonné en 1939.
La base d’hydravions
reprend du service.
Dès la mobilisation
provisoire en avril 1939, l’amiral de Penfentenyo envoie à Saint-Trojan
le lieutenant de vaisseau de réserve André Rousseau. Celui-ci,
ingénieur civil de l’aéronautique chez Zodiac à Rochefort avait été
breveté en 1923, pilote militaire de ballons libres et de dirigeables.
Chez Zodiac, il servait d’interlocuteur entre son entreprise, la seule
en France à construire des dirigeables, et la base aéronavale de
Rochefort, la seule utilisatrice en France de dirigeables. Il est donc
affecté comme commandant de cette base, avec quelques réservistes en
provenance de La Cotinière, du Chapus et aussi du reste de la France.
Vingt ans après le départ
des Américains, il ne reste qu’un hangar à double travée, les deux
cales sont inutilisables et le quai d’appontement en bois est
complètement détruit. Le commandant Rousseau et l’enseigne de vaisseau
de réserve Savatier adressent à l’Etat-Major un rapport concernant les
travaux de réhabilitation à entreprendre, mais au bout de trois
semaines, tous les réservistes sont renvoyés dans leurs foyers. Durant
les mois suivants, les services du Génie maritime construisent un
nouvel appontement en béton et réparent la cale desservant le hangar
subsistant.
Fin août 1939, c’est la
mobilisation générale, les mêmes réservistes sont rappelés à Saint-Trojan
pour armer la Base Auxiliaire Navale de Saint-Trojan, dépendant de
celle de Rochefort. Il s’agit en premier lieu d’évacuer les 40 adultes
et la centaine d’enfants du Préventorium sur d’autres sites répartis
dans l’île d’Oléron. La Base Auxiliaire Navale de Saint-Trojan, une
fois réaménagée, doit servir d’étape de ravitaillement pour les
appareils et leurs équipages qui effectuent la liaison entre Nantes à
Hendaye. Bientôt, l’effectif de la base comprend une trentaine
d’hommes, puis rapidement jusqu’à 80. Cinq ou six embarcations
réquisitionnées dans la région sont affectées aux servitudes, comme
La Fée du Destin, un petit chalutier à voile et à moteur de La
Cotinière, La Marseillaise du Chapus, ou la VP101,
ex-chalutier Jouet des Vagues, de La Rochelle, qui avec sont
moteur de 100 CV peut permettre des interventions en haute mer,
au-delà du Pertuis de Maumusson.
Six corps morts sont
mouillés dans la baie pour accueillir les hydravions, mais pendant les
dix mois de fonctionnement de la base, elle ne recevra que très peu de
visites. Le plus assidu sera certainement le commandant Pichard du
détachement 2S1 de Lorient qui se posera à plusieurs reprises avec son
Gourdon-Leseurre. De son rôle de gîte étape, l’unité se
transforme en base d’hydravions de patrouille en accueillant la 2S2
créée à Rochefort le 1er septembre 1939, puis la 2S1,
escadrille de tradition de l’aéronavale française en provenance de
Lanvéoc-Poulmic, ainsi que 200 personnels supplémentaires. Les
hydravions, 6 pour la 2S1 (LV André Kervella) et 9 pour la 2S2 (EV1
Henri Chouillet), interviennent soit en patrouilles systématiques,
soit sur alerte radio. La zone d’intervention s’étend de Saint-Nazaire
jusqu’au Sud de la Pointe du Verdon. Il y a toujours quatre ou cinq
hydravions CAMS 37 E armés de deux bombes de 75 kilogrammes
type 1ère guerre mondiale au mouillage, prêts à
appareiller pour des missions de 3 ou 4 heures de vol. Au retour de
patrouille, les appareils rejoignent le poste de mouillage par leurs
moyens propres, ou si le courant est trop fort, ils sont remorqués par
une embarcation jusqu’à l’extrémité de la cale. De là, ils sont hissés
sur un double chariot attelé à un tracteur à chenilles Caterpillar
réquisitionné dans l’île.
A partir du 18 juin, de
nombreux appareils fuyant vers le sud font aussi escale à Saint-Trojan
pour se ravitailler en carburant, d’autant que la base en détient
25 000 litres. Ainsi, six CAMS 55.10 de la 2S1 de Lorient, deux
Laté 290 et quatre Gourdon-Leseurre 812 de
l’escadrille 1S2 (LV Paul Soulez) faisant retraite de Lorient à
Hourtin, puis trois Loire 130 et cinq Laté 298 de la 1S1
(LV Jacques Hourdin) en provenance de Cherbourg, enfin les
Léo 258 de la 2S4 évacués de La Baule, ainsi que quelques NC
470 de l’Ecole du Personnel Volant Non Pilote d’Hourtin qui aident
à l’évacuation.
Le 23 juin 1940, le
commandant Rousseau reçoit l’ordre du capitaine de frégate Fournerie
d’évacuer les hydravions sur Hourtin. Les appareils décollent pleins à
craquer d’hommes et de matériel. En quelques mois de présence à Saint-Trojan,
comme en 1918, les appareils n’ont effectués aucune intervention.
Quand, le 27 juin 1940, un major allemand se présente à Saint-Trojan,
il reste encore 80 personnels du service de la base et 80 du service
des escadrilles. Parmi ces derniers, les éléments d’active recevront
sans problème un laissez-passer pour gagner la ligne de démarcation,
les autorités allemandes allant jusqu’à mettre à leur disposition une
camionnette. Le commandant Rousseau, comme les autres réservistes,
regagnera son domicile d’Echillais à partir du 8 juillet 1940 pour y
rédiger son rapport, toujours conservé aux Archives de la Marine de
Rochefort.
Du préventorium au
Foyer Départemental Lannelongue.
Les locaux, très
endommagés par les pillages et les bombardements, sont ensuite remis
en état, réoccupés petit à petit à partir de 1946 et accueillent
également des filles à partir de 1953. Peu de changements sont
apportés dans l'organisation des bâtiments : le bâtiment de l'
administration est agrandi ; celui qui lui faisait face à l' ouest de
l' allée est détruit ; au sud-ouest, les garages surmontés de
logements pour les pompiers sont bâtis ; et des galeries ouvertes sont
ajoutées entre certains bâtiments. L´emplacement du dernier hangar à
hydravions, vaste dalle cimentée, devient un circuit de voitures à
pédales pour les enfants. En bordure, des remises sont construites
pour abriter ces voitures. Le 8 janvier 1974, le préventorium
Lannelongue devient établissement public interdépartemental de Paris,
des Hauts de Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Mais à
cette époque, le nombre d´enfants atteints de tuberculose régresse
considérablement et, depuis 1964, une partie de l´établissement (qui
occupe alors 18 ha) accueille également de jeunes convalescents de
rhumatisme articulaire et de cardiopathies. La reconversion se
poursuit ensuite régulièrement et le centre s´ouvre à des enfants en
provenance de toutes les régions. En 1981, le Conseil d’Administration
se prononce pour la création d’une M.A.S. (Maison d’Accueil
Spécialisée) de 30 lits. Ce projet ne verra jamais le jour.
En juin 1983 un projet de
création d’un service pour Insuffisants Respiratoires Chroniques
Graves est décidé par le CA.
En fait de 1987 à 1991, 2
structures cohabitent sur le même lieu : le Centre Lannelongue (15
lits pour Insuffisants Respiratoires Chroniques Graves) et un Foyer à
double tarification (40 lits pour adultes lourdement handicapés).
En 1991, le Centre
Lannelongue ferme, le terrain et les bâtiments sont remis à l’Hôpital
Local de Saint-Pierre d’Oléron.
En 1992, le Foyer
Départemental Lannelongue (Conseil général) achète la propriété.
Depuis 1999,
l’établissement a une capacité d’accueil de 45 places pour adultes
lourdement handicapés et 15 places pour traumatisés crâniens.
En 2004, un
externat de 5 places est créé. Des bâtiments, situés dans la partie
Est, sont détruits en 2006 pour faire place à de nouvelles
constructions plus adaptées au fonctionnement du centre. |
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Collection de cartes postales Françoise Frétier
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